Massar (Perte de)

Martiel (Aveyron - FR)
44.386381,1.928657
Longueur 21000m Profondeur 120m
Grottocenter / carte

Location

Le puits d'accès à ce réseau s'ouvre à 30 m de la route de Martiel à Villeneuve d'Aveyron, au lieu-dit Massar dans une zone boisée. CDS 46 - 02/03/2014

Description

CDS 46 - 02/03/2014

A la suite de la partie déjà connue de la cavité (soit à 80m de l'entrée), on se heurte au chaos proprement dit qui présente une succession d'étroitures entre blocs. A 110 m de l'entrée, une diaclase haute nous livre un passage important dans le chaos et nous amène à des salles ébouleuses. Après une escalade sur des blocs peu rassurants, on débouche en haut de la première salle fossile. C'est une salle d'effondrement de 100 m de long sur 20 m de large en moyenne. L'extrémité Nord est bien concrétionnée ; un dépôt d'argile de décantation omniprésent y rend la progression hasardeuse et glissante. En dehors des rivières, il faut bien admettre que "l'argile grasse" est un élément permanent de cette cavité. A l'extrémité concrétionnée de cette salle, une galerie basse nous permet d'accéder à la deuxième salle. Celle-ci moins concrétionnée se caractérise par un plafond plat rendant bien compte du pendage et des talus argileux. La hauteur de la salle va en s'amenuisant jusqu'à la réapparition de la rivière. Ensuite, la progression change de nature et devient aquatique. C'est une succession de marmites et de vasques, avec quelques passages bas qui rendent angoissantes d'éventuelles montées des eaux. La profondeur de bain est telle que le spéléo de tête ne se mouille pas plus haut que son "nombril" ; ce n'est pas le cas pour les derniers qui du fait de l'eau trouble ne voient pas les pièges profonds du parcours. Après 100 m, la rivière change d'aspect. La galerie prend nettement un profil en diaclase et les vasques y sont moins importantes. Le concrétionnement y est marqué par des coulées très blanches virant de temps en temps franchement à l'ocre. A 900 m de l'entrée, on débouche dans une grande salle au pied d'une immense trémie tandis que la rivière siphonne. Après une escalade vers la trémie, on accède à un P9 qui s'ouvre dans une zone très instable. Au bas du puits, on accède dans une nouvelle salle au plafond très ébouleux qui a donné naissance à un chaos instable au pied duquel on retrouve la rivière. L'obstacle du siphon franchi, le profil de la galerie continue en une diaclase devenant très haute au fur et à mesure qu'on descend vers l'aval. La progression y est sportive : escalades, vires, marmites et vasques. On observe des lames de corrosion dans la partie basse, tandis que le concrétionnement est fréquent en hauteur et agrémente la visite. La pente de la rivière est assez marquée ; on rencontre sur cette partie trois cascades. Les arrivées d'eau viennent parfois renforcer le débit de la rivière principale, débit en général faible l'été. Après la troisième cascade, le profil de la galerie devient plus cylindrique et perd de la hauteur ; on a perdu la diaclase initiale. Quelques zones ébouleuses refont leur apparition. Un affluent rive droite surgit à 2 mètres au-dessus de la rivière principale dans une zone aux corrosions extravagantes. Après cet affluent, le seul notable du parcours, la pente s'amoindrit, le cours de la rivière devient plus calme, son lit devient sableux et graveleux. C'est le signe annonciateur d'un siphon qui se situe à 2100 m de l'entrée. Lorsqu'il fut atteint pour la première fois, nous pensions naturellement qu'il marquerait le terme de nos explorations. Un retour vers la galerie en diaclase nous a montré qu'elle continue en hauteur par un passage indépendant de la rivière : c'est le début des fossiles de Massar. Le terme de fossiles y est relatif car l'eau et les vasques y sont bien présentes, et à la différence des parties actives elles ne sont pas alimentées en permanence mais seulement en période de pluie. Après une semi-obstruction stalagmitique, on débouche dans une belle galerie de gours qui étaient d'une grande pureté lors de leur découverte. Le conduit continue avec des dimensions respectables ( 10 m x 4 m). La progression y est ponctuée de petites surprises : la dalle branlante, une vire glaiseuse, un puits qu'on enjambe et une "grimpette" glissante à souhait. Après ces divertissements, on arrive à un premier carrefour de galeries, la galerie principale continuant par la main courante. Peu après, un deuxième carrefour de galeries apparaît que nous appellerons le carrefour des fossiles ; c'est là que nous avons établi bivouac et coin restauration, le grand confort... L'aval continue par la galerie de droite et se poursuit au-delà d'une vasque profonde qu'on évite par une escalade latérale. La taille de la galerie s'élargit légèrement ( 6 x 10 à 15 m de haut ) et se poursuit sur 800 m en faisant alterner passages en chaos et escalades le long de massifs de calcite. De nombreux puits communiquent avec le niveau inférieur. Après une salle chaotique, à droite d'un nid de perles, une galerie de dimensions plus réduites et très boueuse nous amène à une portion de rivière coincée entre deux siphons. Le grand fossile se poursuit à partir de la salle. La progression y est ralentie par des puits en entonnoir dans le fond de la galerie, ce qui nous oblige à passer en vire. Vu la taille de la galerie où l'on progresse, il nous paraissait inimaginable que cela puisse se terminer ainsi. Hélas ! Les meilleurs choses ont une fin. Après un curieux passage sous des ponts rocheux, un P13 nous permet de prendre pied dans la rivière terminale à la sortie d'un siphon. Après 100 m de parcours d'une rivière au débit important, un dernier siphon marque l'actuel terminus de ce réseau. Ce système comprend deux affluents principaux : l'affluent de Martiel ( rive gauche ) et le Trep ( rive droite ) où l'on accède à partir des deux carrefours de galeries fossiles déjà signalés. L'affluent de Martiel comprend dans sa partie amont une belle galerie qui se termine brutalement sur un siphon contigu à un gigantesque chaos. L'aval de Martiel est plus réduit. Il est marqué à son début par une série de belles cascades traduisant un enfouissement assez rapide de la rivière dans cette zone. L'affluent du Trep qui débouche dans l'actif de Massar n'est pénétrable que sur une brève longueur. Le cours principal n'est accessible qu'à partir du fossile. C'est une galerie en diaclase assez régulière en général plus étroite que la rivière de Massar. De fréquentes obstructions stalagmitiques nous obligent à des passages au ras de l'eau avec quelques voûtes plus ou moins mouillantes. Vers l'amont de ce ruisseau, on découvre un niveau marneux très caractéristique ; un chaos y a arrêté nos explorations du niveau actif. La diaclase continue également vers l'amont, mais des escalades acrobatiques ont eu raison de notre obstination, d'autant que la proximité de la perte devrait limiter les continuations ultérieures.

Histoire

Le Groupe Spéléologique du Quercy s'est intéressé en 1983 à la perte de Massar après plusieurs tentatives sur d'autres pertes, qui n'avaient pas été couronnées de succès. La perte de Massar n'est pas pénétrable, c'est une absorption en pied de falaise remplie de gravats, branchages et détritus divers de la civilisation. En temps normal, les eaux disparaissent en amont non loin d'un petit lac de pêche, à travers des pertes plus ou moins diffuses réparties dans le lit de la rivière. S'il n'y avait pas eu l'existence d'un puits artificiel creusé au milieu du siècle pour retrouver l'eau, et donnant accès à de petites galeries étroites, nos chances de pénétrer ce réseau souterrain auraient été bien minces. Lorsque nous visitons cette cavité, elle comprend après le puits artificiel de 6 m une petite galerie où la progression à "quatre pattes" est de rigueur. Après une dizaine de mètres, elle laisse la place à une série de laminoirs que nous appellerons les salles basses, qui ne sont que des strates décollées entre elles, suite au travail de sape de leur base par le ruisseau sous-jacent. Un petit boyau donne le passage vers une galerie plus vaste (on est debout) encombrée de blocs et de dalles effondrées au pied desquelles on entend une circulation d'eau provenant en partie de la perte amont du ruisseau. Ce passage confortable ne dure hélas qu'un court instant, il laisse ensuite la place à un chaos de blocs où les étroitures sèches où semi-aquatiques se succèdent. Chaque tentative que nous avons menée pour avancer dans ce chaos nous conduisait inexorablement à une nouvelle étroiture ou impasse. Dans ce travail de recherche, nous travaillions en parallèle avec d'autres groupes qui cherchaient eux aussi la voie de sortie de ce chaos. Alors que le découragement commence à nous gagner, en 1990 nous faisons une avancée notable. Enfin, le 22 avril 1990 ( le jour de la Terre ), une équipe légère trouve la sortie du chaos après moult efforts, incertitudes et avec des frayeurs, il faut bien l'avouer. Les chaos, ce n'est pas toujours rose ! Le réseau de Massar était enfin trouvé, il allait nous livrer de multiples surprises. Plusieurs expéditions souvent longues (plus de quinze heures ) et regroupant parfois une dizaine de membres, furent nécessaires pour arriver à bout de la rivière et de ses affluents. Les grands axes du réseau furent découverts au cours de l'été 1990. L'année suivante fut nécessaire pour peaufiner l'exploration des réseaux annexes et topographier cet ensemble. Concrétionnement de la galerie active du Trep Les explorations de 1991 furent menées grâce à des camps souterrains de trois jours en général. A l'issue de la campagne 1991, le réseau de Massar développe une longueur cumulée de 11 km environ. Le siphon le plus aval est à 2,8 km de l'entrée, le dénivelé maximum est de 118 m, soit une pente moyenne de 4,3 %. A titre indicatif, pour situer ce réseau dans le système plus vaste du Lantouy auquel il appartient, le siphon du gouffre de l'Oule est 80 m plus bas que le fond de Massar pour une distance à vol d'oiseau de 8,5 km, soit une pente inférieure à 1%. Il est fort probable que les cascades de la - rivière de Massar laisseront place à une suite de siphons avec des parties noyées importantes au fur et à mesure qu'on se déplacera vers l'aval. CDS 46 - 02/03/2014

Commentaires

Morphologie

La zone d'accès au réseau de Massar se développe dans un chaos dû à l'effondrement des dalles calcaires minées à leur base par le ruisseau. Les deux salles qui lui font suite sont en fait la continuité de celui-ci. Ces salles doivent leur origine, d'une part à un déblaiement important de ce chaos, d'autre part à la stabilité mécanique des voûtes dans leur profil actuel. Cette stabilité est particulièrement nette pour la 2"e salle dont le plafond est une dalle uniforme de grande portée. Cette première partie ( chaos et salles ) s'est creusée au contact des marnes toarciennes et des calcaires sus-jacents. A la fin de la deuxième salle, la réapparition de la rivière sortant de l'éboulis marque la fin du chaos ; elle est dès lors creusée dans les niveaux calcaires ( Aalénien et Bajocien ). Après une zone limitée de conduits de petite taille, la rivière prend un profil en diaclase dont la section va croissant au fur et à mesure de la progression vers l'aval. C'est le profil dominant de l'ensemble des actifs de Massar. Il se retrouve sur la totalité du parcours du Trep et dans le Martiel partie amont. La régularité des conduits n'est interrompue que par le concrétionnement qui n'obstrue jamais la galerie dans sa totalité, ou par des accidents de type salles d'effondrement ou trémies. On observe sur les trois actifs distincts de ce réseau une zone d'enfouissement rapide des eaux, zone de cascades, où la partie haute de la diaclase se prolonge par des fossiles, tandis que les actifs suivent un trajet indépendant aux dimensions plus réduites. Les actifs sont ensuite rapidement interrompus par un siphon dans cette zone tandis que les fossiles continuent par des galeries de grande taille. La communication fossile / actif, s'établit ensuite par des puits voire par un réseau de petites galeries intermédiaires au-dessus d'une zone noyée.

CDS 46 (02/03/2014)

Hydrologie

La rivière de Massar est alimentée par un débit relativement faible qui correspond bien au débit de la perte de surface. En dehors de l'affluent du Trep, elle ne reçoit guère d'affluent digne de ce nom et pénétrable de surcroît. L'affluent du Trep, quant à lui, à un débit supérieur à Massar bien que la perte qui est censée l'alimenter soit minime. En fait, la totalité du débit est apportée par quatre affluents, parfois pénétrables, situés à peu de distance les uns des autres. Ils ne correspondent pas à des pertes de surface observables. Ils doivent vraisemblablement leur alimentation au drainage des dolines du secteur. Des considérations topographiques et de débit nous font penser que la rivière de Martiel est alimentée par la perte du même nom. En toute rigueur, une coloration sera nécessaire pour conforter cette hypothèse. Il est vraisemblable que l'aval des siphons de Massar et du Trep d'une part, et de Martiel d'autre part, est constitué d'une zone noyée importante. Nous avons pu y observer deux puits siphonnants reliés par une galerie sans écoulement apparent. La réapparition de la rivière dans la partie terminale correspond au moins à la rivière de Martiel. Une coloration sera nécessaire pour prouver la confluence avec les autres rivières. Les deux tronçons de rivière terminale s'écoulent avec une faible pente ; il est probable que la progression ultérieure sera ponctuée de nombreux siphons. Le réseau improprement appelé fossile participe à l'alimentation des actifs inférieurs, en drainant les écoulements temporaires des micro-réseaux supérieurs. Ce phénomène est particulièrement visible en période de pluie où les dômes de calcite sont parcourus par un ruissellement abondant.

CDS 46 (02/03/2014)

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